EMPATHIE ET MALADIES
RESPIRATOIRES
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L’empathie, une notion plus
compliquée qu’on ne le perçoit
généralement
◗ Quand on emploie le mot «empathie», ou que
l’on dit que quelqu’un est «empathique», on veut
généralement parler d’une réaction ou d’un com-
portement «positif» qu’a une personne vis-à-vis
de la souf france d’une autre. Cette façon de voir
les choses n’est pas inexacte, mais elle est incom-
plète.
◗ Lorsqu’une personne est exposée à la souf-
france d’une autre personne, elle éprouve quelque
chose en réponse, elle «résonne». On peut appe-
ler cela la «résonance empathique». Cette réso-
nance est faite d’un mélange de sollicitude et de
détresse. La proportion de chacune de ces com-
posantes va déterminer le comportement que va
adopter la personne : la composante «sollicitude»
pousse vers le soin, avec l’objectif de soulager
l’autre, la composante «détresse» pousse vers la
fuite, ou l’évitement, avec l’objectif de se protéger
soi-même. Résumer «empathie» ou «résonance
empathique» à l’aspect «sollicitude» est donc in-
suf f isant.
◗ L’essouf f lement, ou dyspnée, qui caractérise
les maladies respiratoires et les manifestations
observables qui lui sont souvent associées (res-
piration rapide, bruyante ; expression apeurée,
agitation...) sont très puissantes pour évoquer
la résonance empathique. Cela met la personne
exposée mal à l’aise. Cette personne peut même
éprouver ellemême une sensation davoir du mal
à respirer Ceci devrait se traduire simplement
par de la sollicitude comme cest souvent le cas
pour la douleur Mais alors que tout le monde sait
ce que représente la douleur et que lon connaît
beaucoup de moyens de la soulager ce nest pas
le cas pour la dyspnée page65 La personne qui
en voit une autre avoir du mal à respirer ne peut
pas se projeter clairement dans ce qui se passe et
ne sait souvent pas quoi faire la détresse empa
thique prend facilement le pas et induit un com
portement dévitement avec la culpabilité qui va
avec Cela peut être très dif f icile à vivre surtout si
on ne peut pas ef fectivement «partir», parce que
par exemple on est là pour soigner. Au contraire,
quand le soin résultant de la sollicitude apporte
un soulagement c’est très gratif iant.
◗ Il est donc très important de «travailler» la sol-
licitude empathique face aux maladies respira-
toires et à la souf france qu’elles entraînent. Des
recherches sur le sujet ont montré que le fait d’ex-
poser des soignants à une dif f iculté respiratoire
«expérimentale» (en les faisant respirer à travers
une paille pendant quelques minutes) permettait
de mieux leur faire percevoir ce que les patients
ressentent, et que ceci changeait leur façon d’ap-
préhender le vécu de leurs patients. D’ailleurs,
cela a aussi été démontré avec la découverte de la
dyspnée par le grand public dans le contexte du
port des masques de protection contre la dif fu-
sion de la COVID, dont une étude a montré qu’elle
changeait la façon dont les personnes indemnes
de maladies respiratoires comprenaient ce que
subissent celles qui en sont atteintes.
◗ Pourquoi ce travail sur la «sollicitude respira-
toire» est-il utile ? Pour le plus grand bien des
soignants, d’une part, dont il importe de protéger
le bien-être au travail, pour qu’ils puissent conti-
nuer à soulager les autres, et aussi pour le plus
grand bien des patients, pour lesquels une écoute
«déstressée» et «empathique» (au sens «com-
mun» où le mot est employé) a un important ef fet
thérapeutique, en aidant à combattre l’anxiété.
2
Décryptage : Victoire, sollicitude et
détresse
◗ Dès la page 1, lorsque la petite Victoire souf fre
d’une crise d’asthme en jouant à Colin-Maillard, on
voit bien que ses camarades sont inquiets (case
centrale) : c’est une illustration claire du phéno-
mène de résonance empathique Cest aussi le
cas des parents de Victoire case du bas Page4
Mathilde fait montre de sollicitude visàvis de
sa grandmère elle lui permet de verbaliser ses
peurs ici lanticipation de la dyspnée à la simple
vue dun escalier on reverra plus loin page37
limportance de cette verbalisation pour la com
préhension par Victoire de sa situation Page13
une autre expression négative de la résonance
empathique le mari de Victoire la voyant essouf
f lée dans lescalier manifeste son écho émotion
nel par de la colère Page30 Victoire est hospi
talisée pour une exacerbation sévère de sa BPCO
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